Après le poème d'hier, je reste dans la thématique de la neige avec "Pas de neige pour Anissa?", un petit conte pour les petits et les grands qui espèrent la neige... Bonne journée, les yeux dans le grand blanc, que vous soyez au bord de la mer ou en pleine ville.
- Papa, raconte encore une histoire où il fait froid !
Sous le grand soleil de la Réunion, Papa raconte. Des histoires de villages endormis sous la neige, de traces d’animaux dans des forêts blanches, de lutins portant bonnets et bottes fourrées, de
fées de Noël dans un décor blanc.
Anissa rêve d’un Noël blanc. Elle voudrait elle aussi un grand sapin décoré de bougies et d’étoiles dorées, et savoir à quoi ressemble la neige. Maman a beau accrocher des guirlandes sur le
palmier ou l’acacia, ça ne suffit pas. Noël à la Réunion, c’est chaud et doré, ça n’est jamais blanc et froid. Anissa voudrait aller en France, au pays de Papa, et découvrir la neige.
Et voilà qu'un jour, ses parents lui annoncent qu'ils ont décidé de déménager. Son rêve va devenir réalité! Adieu le soleil réunionnais de Maman, et bonjour la neige de la montagne, la France de
Papa.
28 octobre
Anissa descend de l’avion. Elle débarque sur la terre de Päpa, au pays des histoires magiques. Elle qui s’attendait à trouver la neige dès son arrivée, elle est déçue. Rien. Le ciel est pluvieux,
la ville est grise. Dans la voiture qui les mène au village de Papa, Anissa se dit que sûrement la neige l'attend là-bas, dans les montagnes. Mais quand ils arrivent au village, triste surprise
tout n'est que vert, marron, gris. Pas de blanc. C'est trop tôt, dit Papa, il faut attendre. Alors Anissa attend. C'est long quand on attend.
21 décembre
Toujours pas de neige ! Au village, on lève les yeux au ciel, on guette, on espère… et rien, pas l’ombre d’un flocon. Ce matin, la météo l’a officiellement annoncé : pas de Noël blanc pour cette
année.
Anissa ne veut pas se résigner. Les autres enfants on remisé leurs luges et leurs bottes fourrées, jouent à la marelle et à un-deux-trois-soleil sur la place. Ils échangent leurs cartes et leurs
histoires, leurs rires résonnent dans le village. Anissa ne joue pas. Elle garde son écharpe, ses bottes, ses gants, et elle attend. Un, deux, trois, quand est-ce qu’il neigera ?
23 décembre
Anissa accompagne Maman au marché. Anissa fixe son regard sur les nuages, cherchant toujours la neige. Tout à coup, une fine poussière blanche danse devant ses yeux.
- Maman, regarde ! ça y est, il neige !
- Mais non, c'est de la farine, répond Maman. Regarde devant la vitrine, c’est le boulanger qui secoue son grand tablier. Si tu arrêtais de regarder en l’air ? Tu vas finir par tomber !
Anissa baisse les yeux et se remet à marcher.
Soudain, là, contre ses pieds, le vent fait glisser deux petites choses toutes blanches.
- Maman, des flocons !
- Mais non, ce n’est que du coton. Sans doute échappé des décorations devant la pharmacie, là-bas, tu vois ? Si tu regardais devant toi, au lieu de marcher tête baissée ? Tu vas finir par
te cogner !
Anissa relève un peu la tête et se remet à marcher.
Bientôt, elle voit passer trois petits riens légers et blancs, qui dansent au vent.
- Maman… regarde, là ! C’est quand même bien de la neige, ça ?
- Mais enfin Anissa, tu ne vois pas que ce sont des plumes ? Regarde derrière toi, c’est Madame Mercier qui secoue ses vieux oreillers ! Tu ne verras pas la neige tout de suite, ma chérie. Pas
pour Noël. Mais l’hiver n’est pas fini, patience, ça viendra. Plus tard.
Mais Anissa ne veut pas patienter. Elle croit toujours aux miracles de Noël. Le Père Noël lui apportera forcément de la neige. Elle y croit dur comme fer, rien ne saurait la persuader du
contraire. En attendant, elle veut bien imaginer. De la fausse neige, pour rêver. Tiens, là, sur l’étal du pâtissier, des gâteaux couverts de chantilly : de la neige à manger ! Une jolie
cape blanche posée sur un banc dans la vitrine de vêtements : on dirait une colline enneigée. Ce jeu lui redonne le sourire. Il suffit d’imaginer.
25 décembre, tôt le matin
Anissa saute du lit et fonce à la fenêtre. Pas un pouce de neige, le village est toujours gris. Sous le sapin, Anissa a reçu de beaux cadeaux, mais elle n’arrive pas à s’en réjouir. Le Père Noël
n’a rien compris !
Il lui manque quelque-chose. La neige, oui. Mais aussi… ses amis dansant avec elle autour du palmier tout illuminé, et les jeux sur la plage ensoleillée, les bonbons coco, le jus de mangue. Elle
y pense tellement fort qu’une larme coule sur son oreiller. Elle se blottit dans son lit avec son bonhomme de neige en tissu, et ferme les yeux pour regarder ses souvenirs. A quoi bon avoir tout
quitté, si elle ne peut même pas vivre un Noël blanc?
25 décembre, juste avant midi
Anissa sort de sa chambre. Pas un bruit autour d’elle. Où sont Papa et Maman ?
Elle se dirige vers la cuisine. La porte s’ouvre en grand à son arrivée.
- Surprise !, crient Papa et Maman, Madame Mercier, la pharmacienne et le boulanger, rassemblés serrés dans la petite cuisine.
Anissa a du mal à reconnaître la cuisine. Elle est entièrement blanche. Du sol au plafond s’étalent des kilomètres de tissu blanc et molletonné, les fenêtres sont couvertes de givre pailleté, et
à chaque pas Anissa soulève un nuage de coton et de plumes emmêlées disséminés sur le sol. Quel bazar! Comme si une tempête avait soufflé.
Sur la table, Anissa voit s'étaler des tas de gourmandises. Des gâteaux à la chantilly, des pains tout enfarinés, des maisons de pain d’épices couvertes de glaçage, des sapins de pâte d’amande,
des bonshommes de neige en pâte à sucre. Un vrai paysage de Noël en miniature.
Anissa n’en revient pas :
- Oh… C’est comme s’il avait neigé dans la cuisine. Merci, merci !
Elle saute au cou de Papa, de Maman, embrasse les marchands qui tous ont l’air très fiers de leur surprise. Puis, le regard coquin, elle lance:
- On peut la manger, cette neige-là ?
Et le nez dans la chantilly, elle rit. La vraie neige arrivera quand elle voudra, Anissa a eu son Noël blanc.
Joyeux Noël les gourmands!
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