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24 décembre, conte champêtre de Noël

La fenêtre du 24 décembre, traditionnellement, renfermait une image ou un chocolat en forme de crèche. Le conte d'aujourd'hui reprend donc cette tradition, et vous emmène devant la crèche, auprès de cet enfant qu'on célèbre toujours au côté des pères Noël et autres lutins farceurs. Et si cet enfant était lui aussi un précieux lutin veilleur? A chacun.e ses croyances, l'espérance, elle, est à tout le monde. 

Que l'espoir et la lumière soient dans vos maisons. Merci d'avoir traversé l'Avent à mes côtés, et joyeux Noël!

 

PS : si vous avez envie de me faire des retours sur mes textes ou de me partager les vôtres, je vous lirai avec plaisir, en commentaire ou en message privé.  A bientôt!

 

Illustration Juan Ferrandiz, artiste espagnol (1917-1997)
Illustration Juan Ferrandiz, artiste espagnol (1917-1997)

Il était une fois, il y a très, très longtemps, une petite fille du nom de Myriam. Elle vivait seule avec son père, David, et l'aidait souvent à garder les brebis. David était berger. Il enseignait à sa fille les soins du troupeau tout aussi bien que le nom des étoiles. Elle apprenait avec lui à se repérer sur les routes, à tresser des cordes, à jouer de la flute, à appeler arbres et fleurs par leur nom.

Souvent, David et Myriam rejoignaient d'autres bergers, d'autres troupeaux qui paissaient dans la grande plaine. Sous les arbres, ils partageaient les longues nuits de veille, heureux de pouvoir se relayer.

C'est une nuit comme celle-ci que toute l'histoire commença. Une histoire extraordinaire, qui débuta dans une grande lumière...

 

Quand Myriam se réveilla cette nuit-là, elle sentit tout de suite que quelque-chose n'était pas comme d'habitude. Les autres bergers dormaient, les moutons aussi. Mais quelle était cette clarté intense qui se faufilait jusque sous ses paupières? Myriam ouvrit un oeil, puis l'autre. Alors elle les vit. Vêtus de longues robes blanches, ils glissaient au-dessus du sol, comme des oiseaux en vol. Comme des oiseaux, ils avaient des ailes douces. Comme les oiseaux, ils chantaient.

Myriam tira son père par la manche. David se réveilla en sursaut, et se frotta les yeux, lui aussi. Mais il ne rêvait pas : c'étaient bien des anges! Leurs chants et la lumière intense finirent par réveiller tous les autres bergers. Chacun ouvrait de grands yeux ronds, essayant de comprendre ce qui se passait. 

 

Enfin, les mots chantés par les anges finirent par atteindre leurs oreilles et leurs coeurs. Ils comprirent le sens de leur message:

"Gloire à Dieu au plus haut du Ciel, paix et joie pour les habitants de la Terre... Un enfant est né, Fils de la Lumière.

Vous le trouverez tout près d'ici, Suivez l'étoile, il vous attend.

Chantez, dansez, soyez en Fête, car il porte en lui tout l'espoir du monde!"

Puis les anges disparurent dans la nuit, comme avalés par le ciel immense. Une étoile nouvelle, éclatant de blancheur, ouvrait aux bergers de nouveaux chemins. Les bergers se regardaient l'un l'autre, abasourdis.

 

Illustration Juan Ferrandiz
Illustration Juan Ferrandiz

Myriam, elle, avait envie de chanter, de courir, de sauter. La musique des anges lui fit sortir sa flûte pour en jouer. Mais dans sa hâte, elle la fit tomber, sa flûte, sa fragile flûte de sureau qui avait appartenu à son père et était déjà bien abîmée par le temps. La flûte tombée se brisa. Myriam était catastrophée. Elle qui avait déjà imaginé aller jouer pour cet enfant de lumière! Qu'allait-elle faire à présent? 

 

Les autres bergers s'étaient ressaisis. Eux aussi voulait aller voir l'enfant. On rassembla les troupeaux et on se mit en route, le coeur joyeux et curieux. Chacun réfléchissait au cadeau qu'il pourrait offrir à cet enfant.

- Une peau de mouton pour lui tenir chaud, bien sûr!

- Et un peu de lait, évidemment.

- Je donnerai du pain à ses parents, ils en auront sûrement besoin.

- Et moi cette boisson.

- J'apporterai du bois pour nourrir le feu...

- Et moi cette toile fine pour ses langes.

Ainsi, chacun avait une idée, un cadeau à offrir à l'enfant. Mais elle? Que pouvait-elle offrir? Elle ne possédait rien à elle. Rien d'autre que la flûte qui venait de se briser. Les yeux baissés vers le sol, Myriam n'arrivait même plus à se réjouir. Elle marchait de façon automatique, suivant de loin le cortège.

 

C'est alors qu'elle aperçut, dans l'herbe rase, de minuscules fleurs dont elle ne connaissait pas le nom. Elles étaient si blanches que sous la lune elles semblaient briller comme des étoiles. Si belles, si attirantes. Si petites aussi. Mais ce serait mieux que rien. Myriam se pencha pour les cueillir et en fit ainsi un petit bouquet. Ce serait un joli cadeau, non?

 

La marche fut longue. L'étoile semblait s'éloigner à mesure qu'ils avançaient. Finalement, l'étoile s'arrêta au-dessus d'une grange, pareille à toutes les granges où les bergers avaient l'habitude de s'arrêter pour une nuit.

Là, dans le souffle chaud d'un âne et d'un boeuf, un enfant dormait, blotti dans les bras de sa mère. Il semblait avoir la peau tissée de lumière. Et dans le regard de la jeune mère, ils virent tout l'amour du monde.

Le jeune père s'écarta pour les laisser entrer, comme s'il les attendait. Les bergers s'approchèrent, intimidés tout à coup, et déposèrent leurs cadeaux près de l'enfant. Ce dernier ouvrit les yeux, agita ses petites mains dans l'air, et sembla sourire au ciel. Puis il tourna la tête, lentement, sur le côté, là où Myriam se tenait à demi cachée derrière son père. Elle regardait l'enfant, et la douceur de cette maman qui le berçait. Elle n'osait pas avancer, hésitant entre peur et envie. David la poussa délicatement vers l'enfant. Myriam n'osait même pas regarder l'enfant. C'est à la mère qu'elle s'adressa:

- J'ai voulu cueillir des fleurs pour le bébé. Mais elles sont bien petites... Ce n'est pas un très joli cadeau.

La mère de l'enfant sourit et répondit:

- Bien sûr que si.

Elle saisit le bouquet avec gratitude, et le déposa tout près de l'enfant.

 

photo Isabelle Bouchex, été 2024
photo Isabelle Bouchex, été 2024

 

Myriam vit alors, émerveillée, le petit poing serré du bébé s'entrouvrir, attraper une fleur, l'approcher de ses lèvres, et y déposer un baiser léger. A cet instant, une grande lumière traversa le coeur blanc de la fleur qui devint tout doré, jaune comme un soleil. Tout l'espoir du monde glissé dans une fleur. Anissa sourit, et son sourire était lui aussi lumineux.

 

Depuis, ces petites fleurs blanc et or poussent partout dans le monde, se dressant fièrement dans le moindre coin de pelouse. Vous les connaissez sans doute? Une corolle blanche, un coeur jaune et, parfois, quelques touches de rose sur le bord. Les pâquerettes, puisqu'il s'agit bien d'elles, gardent à jamais le souvenir des lèvres de l'enfant qui ont déteint légèrement sur elles, leur offrant l'or de sa lumière et le rose de son amour. Tout l'espoir du monde.

 

 

 

Texte Isabelle Bouchex, d'après un conte populaire

(Merci de ne pas copier ce texte sans me demander l'autorisation)

 

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